En hommage à Roger & Micheline,
instituteurs de campagne, dans les années... 1945...
instituteurs de campagne, dans les années... 1945...
C’est un film espagnol de José Luis Cuerda, sorti en 2000, sur un scénario de Rafael Azcona, d’après trois nouvelles de Manuel Rivas.
Nous sommes en 1936, à la fin de l’hiver, dans un petit village de Galice. Moncho vient d’avoir huit ans et il va pour la première fois à l’école. Il aurait du commencer l’année scolaire avec les autres, en septembre, mais son asthme a retardé l’échéance. L’école, il en a une trouille bleue : on lui a raconté que les maîtres battent les enfants. Et d’ailleurs, le premier jour, il s’enfuit terrorisé, et passe la nuit dans la montagne avant de rentrer à la maison plus mort que vif.
Il faudra que son maitre d’école, Don Gregorio, vienne le chercher en personne chez lui. Et à son arrivée en classe, Moncho sera accueilli par des applaudissements : de quoi lui faire oublier ses craintes, et lui donner un moral d’enfer pour commencer à apprendre.
Avec don Gregorio, apprendre est un plaisir, une espèce de grande aventure. Le vieux maitre a la sagesse chaleureuse et le savoir gai, transmettant avec gourmandise aux mômes des connaissances aussi fondamentales que peu académiques : l’origine américaine de la pomme de terre, les manières courtoises du ptilonorynque, et pourquoi les papillons ont la langue enroulée comme un ressort de montre…la lengua de las mariposas…
Il leur fait lire des poésies à haute voix et leur apprend en passant ce qu’est l’honnêteté quand il refuse les cadeaux d’un notable local qui voudrait un traitement de faveur pour son rejeton.
Le printemps venu, Don Gregorio trimballe son petit monde dans les champs : l’observation de la nature est bien plus formatrice que n’importe quel cours magistral. Bref, c’est un professeur de vie, avec qui Moncho tisse une relation tendre et profonde, partie pour durer toujours.
Hélas le monde a son mot à dire. En ce mois de juillet 1936, les nouvelles ne sont pas bonnes : une ère nouvelle s’annonce, qui balaie d’un coup de botte toutes les valeurs humanistes inculquées par un vieux maitre d’école idéaliste…
Je tire ce commentaire de la gazette Utopia n° 175 du 6 avril au 10 mai 2011, que je trouve chez Francis Fernandez, mon kiné préféré, qui pratique la méthode Mézières apprise autrefois dans le Gers auprès de Mademoiselle herself, et qui est d’origine espagnole comme l'indique son nom évidemment.
Dans les années 1947, à la Vieux-Rue petite commune de Seine-Inférieure comme on l’appelait alors, j’ai des souvenirs communs avec Moncho. Papa et maman me faisaient l’école, on apprenait « my taylor is rich » sur un magnétophone. Le piano, le théâtre et la danse sur fonds de « Beau Danube bleu », faisaient partie de nos humanités. Papa cultivait deux jardins dont il ornait les allées en briques de bordures d'oeillets blancs dont je me souviens encore de l'odeur. Il me faisait tremper les jeunes poireaux dans la bouse de vache ramassée dans la rue avant de les mettre en terre, et élevait Machaon dont on trouvait les chenilles sur les carottes. Il nous concoctait tous les ans une grande journée papillons, dont le clou était une présentation d’espèces naturalisées ouverte aux habitants de la commune extasiés de merveilles qu'ils n'auraient jamais eu l'idée d'observer dans la nature auparavant. Le dimanche je servais la messe du curé qui s’appelait Frelon, je vous assure que c’était son vrai nom. Il y avait un sénateur qui s’appelait Pit, mais je vous rassure son prénom n’était pas Brad. Papa nous apprenait la géologie, dans des bouquins niveau seconde d’aujourd’hui. Au certificat d’études d’alors, les premiers étaient du niveau troisième d’aujourd’hui, mais l’objectif était d’intégrer le Lycée Corneille de Rouen en 6ème latin pour les déclinaisons. Et dans la foulée d'apprendre l'allemand qui se décline aussi, et n'est donc pas plus difficile que le latin, natürlich. L’allemand étant plus compliqué, ce serait un plaisir d’apprendre l’anglais en seconde langue puisque l'anglais ne se décline pas : il faut toujours se coltiner d’abord les emmerdements maxi. Entrer le premier chez le dentiste par exemple. Ensuite, on n’oublie plus cela de toute sa vie !
Et alors ?
La lengua de las mariposas ?
Il faut savoir que les pièces buccales des papillons sont transformées en trompe, enroulée en spirale pour aspirer le nectar. La trompe est formée par les galeas des maxilles qui sont fortement allongées et reliées entre elles par deux coaptations : l’antérieure formée de soies et la postérieure formée de crochets qui les solidarisent fortement, formant ainsi un canal qui permet l’aspiration du nectar. Toutes les autres pièces buccales sont atrophiées ou absentes, à l’exception des palpes labiaux qui protègent la trompe lorsqu’elle est enroulée au repos.
La trompe des papillons est un outil de haute précision qui cumule les prouesses techniques.
Au repos, elle reste enroulée en spirale comme un ressort de montre, sous l'effet d'une lame élastique qui court tout au long de sa paroi supérieure. Une succession d'anneaux de chitine - substance très résistante - maintient la canalisation béante quelle que soit sa courbure.
Lorsque le papillon veut se nourrir, il contracte une série de plusieurs centaines de minuscules muscles obliques, situés dans l'épaisseur de la trompe, dont ils provoquent le déroulement. Au premier tiers de la longueur, des muscles spéciaux coudent la trompe vers le bas. Cette articulation souple favorise en particulier la recherche du nectar dans les corolles les plus étroites et les plus profondes. Sans même avoir à baisser la tête, le papillon déplace sa trompe pour explorer tous les recoins des fleurs qu'il visite. Dans la tête de l'insecte, une sorte de poire peut se dilater sous l'action de muscles puissants. Elle fait office d'aspirateur. Les papillons de jour se posent sur les corolles. Grâce à des organes gustatifs très sensibles situés au bout de leurs pattes, ils savent immédiatement s'il y a lieu de déployer leur encombrant attirail d'aspiration.
Voici à quoi cela ressemble pour un papillon de jour :
Chez certains Sphinx, la trompe est « calculée » (Darwin nous dit que c’est en réalité l’évolution qui a permis cette coïncidence) pour être « un poil » plus longue que la corolle de la fleur nourricière. Par exemple Convolvuli est le sphinx gris du liseron. Les beaux soirs d’été quand vous avez chassé les moustiques de la table dehors où vous avez préparé le repas, vous le voyez arriver, fusée grise aux ailes postérieures roses, qui fait du sur-place comme un hélicoptère. Sauf que ses ailes battent à toute vitesse comme un colibri, et ne tournent pas autour d’un axe. A cette vitesse, vous distinguez le corps marqué de triangles roses de part et d’autre, et vous ne voyez rien des ailes tellement elles battent vite. Mais quand convolvuli a repéré une fleur de liseron, voyez comme il se déplace souvent latéralement. Et pile en face de la corolle, il déploie sa trompe qui ressemble un peu aux tuyaux des Mirage qui font du ravitaillement en vol avant d’attaquer les chars de Kadhafi. Attendez, ce n’est pas de la rigolade : la trompe mesure 12 cm , autant que l’envergure de "l’avion" ! Et il aspire le nectar placé au fond, une corolle de liseron étant vous le savez plutôt profonde. On pourrait prononcer le terme, s’il n’avait pas été galvaudé par les films X, de : « Gorge profonde… » Tout cela avec une trompe… d’éléphant. Je vous ai déjà montré la trompe en question repliée dans l’étui de la chrysalide.
Donc vous voyez, il n’y a pas que les éléphants….
Qui trompent énormément !
ravitaillement en vol |
Ce convolvuli est un fainéant+"morfal" : il a préféré foncer (au plus profond) de la gorge (profonde)
du liseron
sans déployer sa trompe !
il y a toujours des petits futés pour contourner la règle !